Au ras de mes semelles
(textes de Catherine)
Au ras de mes semelles un tapis de feuilles de chêne étale sa rousseur sèche
Au ras de mes semelles une petite violette solitaire frémit doucement
Au ras de mes semelles la vie souterraine des racines affleure sur le chemin
Et là-haut les arbres dressent leurs mâts obliques et le vent secoue la fine dentelle des branches dénudées loin au-dessus de nos têtes
Au ras de mes semelles les hépatiques inclinent leurs têtes mauves avec mélancolie
Au ras de mes semelles le sentier de sable blond se pique de cailloux blancs, roses et gris
Au ras de mes semelles monte une odeur de terre humide et de pourriture végétale
Et là-haut les oiseaux se déchaînent et lancent leurs envolées de trilles loin au-dessus de nos têtes
Au ras de mes semelles clignotent les coucous jaunes pâles et les narcisses blancs
Au ras de mes semelles les jeunes mousses éclatent leurs verts aigus
Au ras de mes semelles un bourdon esseulé explore le talus
Et soudain le gris du ciel se déchire et laisse place au bleu infini et
aux troupeaux de nuages loin au-dessus de nos têtes
(texte de Rollande)
Au ras de mes semelles, un effort de printemps,
Poussée de mauve, promesse de narcisse.
Au ras de mes semelles, quatre boules de houx sur fond de feuilles dentelées.
Au ras de mes semelles, des racines s’enlacent, le lierre enserre l’écorce moussue.
Saignée de l’if au-dessus de nos têtes,
Gerbes de gui comme des nids,
Paroi impassible au-dessus de nos têtes,
Encore au-dessus, du bleu gris, du gris bleu, comme on veut.
Fente dans le roc au-dessus de nos têtes,
Fuite des nuages, ogives de tiges obliques.
Vertige.
Le sol humide glisse sous mes semelles.
Sur un tapis de feuilles rousses criblées d’hiver,
Une touffe de violettes défie le vent d’avril.